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Mise à jour le 4 janvier 2023 à 10:09 am

Chimie des substances naturelles en Amazonie : les « défenses chimiques humaines » – Diversité, interactions, inspiration.

Madame Émeline HOUËL, présentera ses travaux en vue de l’obtention de l’Habilitation à Diriger des Recherches


Sujet : Chimie des substances naturelles en Amazonie : les « défenses chimiques humaines » – Diversité, interactions, inspiration.
Candidat :  Madame Émeline HOUËL
Directeurs des travaux : Monsieur ORIVEL Jérôme
Spécialité :  Chimie des substances naturelles
Date :  mercredi 8 juillet 2020 à 09h00, à l’Institut Pasteur, 26, 16 Avenue Pasteur à Cayenne.

Résumé

En une soixantaine d’année et à travers les développements de l’écologie chimique, les métabolites secondaires, devenus métabolites spécialisés, ont « gagné leur place » dans le domaine écologique. Ils sont en effet passés du statut de dommages collatéraux des voies de biosynthèse du métabolisme primaire à celui de pivot de l’écologie chimique. L’homme trouve cependant aussi toute sa place dans ce modèle écologique. Il a en effet au fil des siècles mis à profit ces fonctionnalités dans ce qui peut être appelé, comme défini par May Berenbaum, les « défenses chimiques humaines », c’est-à-dire l’utilisation des composés bioactifs issus des plantes afin de se protéger contre divers agresseurs (insectes, parasites, pathogènes). En termes d’usages et de valorisation, la compréhension du rôle fonctionnel de ces composés dans l’environnement pourrait donc inspirer de nouvelles voies de recherche dans des domaines variés, allant de l’ethnopharmacologie à la recherche de molécules d’intérêt, thérapeutique ou insecticide par exemple.

Les travaux réalisés abordent ce questionnement à travers différents champs : l’étude de remèdes traditionnels amazoniens dans un premier temps, l’analyse de l’activité antifongique d’huiles essentielles issues de la flore locale ensuite, et enfin la recherche d’insecticides naturels d’origine végétale. Ces trois domaines ont pour point commun de représenter des sujets d’étude classique en chimie des substances naturelles, et d’alimenter traditionnellement une vaste bibliographie décrivant l’isolement de molécules bioactives. L’objectif ici sera de montrer qu’en parallèle de ces aspects une vision à la fois plus large et plus intégrée de ces domaines peut être envisagée, en prenant en compte pour les aborder l’intérêt des mélanges complexes et l’existence d’interactions, et dans un contexte de recherche fortement interdisciplinaire.

En conclusion, des réflexions sur l’intégration de ces recherches dans la société seront abordées. Une des particularités de ce travail de recherche est en effet de se situer en Guyane, au contact des populations détentrices de savoir et des ressources biologiques, et dans le contexte d’un territoire en développement. Ces paramètres possèdent donc un impact notable sur les questions scientifiques étudiées. Ainsi, les travaux menés ces dernières années ont été l’occasion de construire un ancrage fort avec la Guyane, aussi bien sur les questions de connaissances locales et de biodiversité végétale que sur les aspects sociétaux ou économiques.

Les perspectives proposées découlent naturellement de ces questions scientifiques et humaines, et sont axées autour du développement d’outils analytiques innovants en chimie pour la construction de projets en ethnopharmacologie, mais aussi  autour du bois, de l’arbre et de la forêt.

Dans le premier cas, les questions qui orienteront les travaux futurs en ethnopharmacologie sont les suivantes : de l’ethnopharmacologie pour quoi, pour qui, et comment ? Cette dernière question pourra en particulier aussi bien inclure des considérations éthiques et écologiques, dans le sens d’un développement durable pour les ressources et pour l’homme, que des questions techniques. Une des pistes proposées sera donc l’étude de la toxicité de certaines préparations. Une des voies possibles serait de répondre à des demandes locales ou des cas concrets signalés par les instances médicales, comme cela a par exemple déjà été le cas lors des intoxications constatées suite à la consommation de bita. Le développement d’outils adaptés en chimie analytique couplés à des analyses multivariées des données obtenues pourrait participer dans ce domaine à la fois à une meilleure connaissance des remèdes, et à des recommandations éventuelles sur les pratiques médicinales en vue de la protection de la santé des populations.

Dans le second cas, des réflexions sont déjà actuellement en cours autour de la chimie du bois de Sextonia rubra, ou Grignon franc, une Lauracée étudiée depuis longtemps au laboratoire pour ses propriétés de résistance naturelle aux termites et champignons lignivores en vue de la découverte de nouveaux produits de traitement des mycoses humaines dans une approche bioinspirée ou pour ses propriétés larvicides vis-à-vis du moustique Ae. aegypti. Les composés en lien avec ces diverses activités ont été identifiés comme le rubrénolide et le rubrynolide, deux γ-lactones isolées du duramen de cette espèce. Une nouvelle voie de biosynthèse de ces composés a de plus été proposée suite à l’isolement de deux deux γ-lactones précurseurs dans l’aubier de l’arbre et à la visualisation in situ de l’ensemble de ces molécules dans le bois par des méthodes innovantes d’imagerie TOF-SIMS. Des variations de la composition chimique du duramen ayant également été observées, en lien avec l’environnement de l’arbre, les objectifs sont maintenant de s’intéresser à la chimie du bois à l’échelle de l’arbre pour l’étude de la répartition spatiale des métabolites, d’étudier d’autres facteurs pouvant avoir une influence sur la variabilité des profils chimiques, notamment l’âge aussi bien du bois que de l’arbre, et enfin d’explorer le lien entre profil chimique, communautés microbiennes et performance du bois en termes de durabilité naturelle. L’idée ici est donc de replacer les molécules dans le contexte de l’organisme vivant, dynamique et en interaction, en lien avec leur rôle fonctionnel.

Abstract

During the last 60 years and due to the development of chemical ecology, the so-called secondary compounds went from plants waste products to essential ecochemicals, and are now recognized as specialized metabolites. Mankind is however also included in this ecosystem. These compounds’ functionalities and bioactivities have indeed been employed by humans for centuries to defend themselves against various attackers such as insects, parasites or other pathogens. These molecules can therefore also be considered as “human chemical defenses”, as proposed by May Berenbaum. In terms of use and valorization, understanding the functional role of the compounds in their environment could inspire new research perspectives in various fields, from ethnopharmacology to the discovery of bioactive therapeutic or insecticidal compounds.

The described works address these questions through the study of Amazonian traditional remedies, the analysis of the antifungal activity of essential oils, and the search for novel botanical insecticidal compounds. These research fields have in common the fact that they are classical subjects in the domain of natural substances chemistry, and historically led to the discovery of numerous active compounds. However, the objective will be to highlight that a wider and more integrative perspective can concurrently be considered, by taking into account the interest of complex mixtures and the existence of interactions, in a strongly interdisciplinary research context.

In conclusion, considerations on the integration of this research into society will be discussed. One of the characteristics of this research work is to be located in French Guiana, in contact with knowledge-holding populations and biological resources, and in the context of a developing territory. These parameters thus have a significant impact on the scientific issues studied. The work carried out in recent years has therefore been an opportunity to anchor this research in French Guiana, as well concerning local knowledge and plant biodiversity as societal or economic aspects.

The proposed perspectives naturally stem from these scientific and human issues, and are centered on the development of innovative tools in analytical chemistry for the construction of projects in ethnopharmacology, but also about wood, trees and forest.

In the first case, the questions that will guide future work in ethnopharmacology can be asked simply as follows: why, for whom and how? In particular, the last question may as well include ethical and ecological (in the sense of sustainable development for resources and mankind) considerations, as technological issues. One of the proposed tracks could be the study of the toxicity of certain preparations. It would notably be relevant to respond to local requests or cases reported by medical authorities, as with poisonings previously observed as a result of bita consumption. The development of adapted tools in analytical chemistry coupled with multivariate analysis could contribute in this field both to a better knowledge of the remedies, and to possible recommendations aiming at protecting the health of the populations.

In the second case, projects are in construction concerning the chemistry of the wood of Sextonia rubra (grignon franc), a Lauraceae tree already studied in our laboratory for its natural resistance against termites and lignivorous fungi. These studies led to the discovery of novel compounds for the treatment of human mycoses through a bioinspired approach, or larvicidal properties towards the mosquito Ae. aegypti. The molecules responsible for these various activities were isolated from S. rubra heartwood and identified as the γ-lactones rubrenolide and rubrynolide. A new putative biosynthetic pathway was also proposed following the isolation of two precursor compounds from the tree sapwood and the visualization of all the cited molecules in situ by TOF-SIMS techniques. Since chemical variations related to the tree environment were also observed in heartwood, the objective is now to focus on S. rubra wood chemistry at the tree scale, including spatial and temporal gradients and taking into account the role of wood microbial communities for the tree natural durability finally to explore the relationship between chemical profiles, microbial and wood performance in terms of natural durability. Eventually, the aim of these projects will be to replace the described molecules in the context of the tree as a living and dynamic organism, characterized by its interactions with its environment, and in relation with the functional role of these compounds.

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