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Grossesses a haut risque dans le bassin du Maroni : conséquences des maladies infectieuses sur la morbi-mortalite maternelle, fœtale et néonatale

Monsieur Najeh HCINI
présentera ses travaux en vue de l’obtention du Doctorat

Spécialité : Recherche clinique, Innovation technologique, Santé publique.

Sur le sujet : « Grossesses a haut risque dans le bassin du Maroni : conséquences des maladies infectieuses sur la morbi-mortalite maternelle, fœtale et néonatale »

Laboratoire de rattachement : CIC 1424 Inserm

Codirecteurs de thèse : Monsieur Mathieu NACHER, Professeur des universités et Praticien hospitalier au Centre Hospitalier de Cayenne et à l’Université de Guyane et Madame Jeanne SIBIUDE, Maître de conférences des universités-Praticien hospitalier au Centre Hospitalier Louis MOURIER et à l’Université Paris Cité.

La soutenance sera publique et aura lieu à : L’Université de Guyane, à l’Amphithéâtre A, Campus de Troubiran, BP 207922091 Route de Baduel – 97337 Cayenne Cedex. Le jeudi 21 décembre 2023 à 10h (heure de Guyane).

Devant le jury de soutenance composé de :

  • Monsieur Pierre BUEKENS, Professeur des universités au département d’épidémiologie à l’École de santé publique et de médecine tropicale de l’Université Tulane ; Centre d’épidémiologie émergente de la reproduction et périnatale à l’Université Tulane (Rapporteur) ;
  • Madame Malis, DOUINE, Professeure des universités-Praticien Hospitalier au Centre Hospitalier André ROSEMONT et à l’Université de Guyane (Examinateur) ;
  • Monsieur Loïc EPELBOIN, Professeur des universités et professeur Hospitalier au Centre Hospitalier André ROSEMONT et à l’Université de Guyane (Examinateur) ;
  • Monsieur Olivier PARANT, Professeur des universités et Praticien hospitalier au Centre Hospitalier Universitaire de Guadeloupe et à l’Université des Antilles (Examinateur) ;
  • Monsieur Olivier PICONE, Professeur des universités et Praticien hospitalier au Centre Hospitalier Louis MOURIER et à l’Université Paris-Cité (Examinateur) ;
  • Madame Dominique ROUSSET, Docteure, HDR à l’Institut Pasteur de Guyane (Examinateur) ;
  • Madame Jeanne SIBIUDE, Maître de conférences des universités-Praticien hospitalier au Centre Hospitalier Louis MOURIER et à l’Université Paris Cité (Codirectrice de thèse) ;
  • Madame Christelle VAULOUP-FELLOUS, Professeure des universités-Praticien Hospitalier à l’Hôpital Paul Brousse à la Faculté de Médecine de Paris-Sud, Assistance Publique Hôpitaux de Paris (rapporteur).
  • Monsieur Mathieu NACHER, Professeur des universités et Praticien hospitalier au Centre Hospitalier de Cayenne et à l’Université de Guyane, (Directeur de thèse) désigné comme invité.

Résumé

Les agents infectieux sont reconnus comme cause de morbi-mortalité maternelle et fœtale. Les récentes urgences sanitaires mondiales causées par le virus Zika (ZIKV) et le coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère 2 (SARS-CoV2) ont mis en évidence la vulnérabilité humaine face aux infections émergentes.  Les nombreuses épidémies qui frappent la Guyane soulignent l’importance de l’exposition de la population guyanaise à de nombreux agents pathogènes. Les femmes enceintes et leur fœtus sont particulièrement vulnérables à ces infections émergentes, conséquence des modifications physiologiques de la grossesse chez la mère et d’une immunité fœtale encore immature. L’impact négatif résultant des infections implique, à des degrés variables, plusieurs mécanismes tels qu’une détérioration de l’état hémodynamique maternel, un effet tératogène, ou une infection placentaire et/ou fœtale.

Le territoire guyanais, bien inséré dans son contexte amazonien, est par ailleurs un territoire en pleine croissance avec un taux de natalité parmi les plus élevés en France. Ce département français est complexe avec des populations d’origines ethniques diverses vivant parfois dans des conditions difficiles. Ainsi, les femmes enceintes en Guyane peuvent être particulièrement exposées aux menaces infectieuses dans un contexte d’éloignement géographique doublé de la problématique récurrente des inégalités d’accès aux soins, et d’une densité médicale insuffisante, surtout dans l’ouest du territoire.

D’un autre côté, les études confirment que la mortalité infantile est importante et le taux de prématurité reste parmi les plus élevés en France. Des questions se posent sur le rôle que pourrait jouer les différentes expositions infectieuses dans ce risque majoré. Par ailleurs, malgré ce contexte social difficile, la population des femmes enceintes bénéficie d’un système de soins français, de moyens diagnostiques et thérapeutiques à un niveau européen (et ce même en l’absence de couverture sociale), et d’une expertise médicale permettant le diagnostic rapide et la prise en charge de ces pathologies infectieuses. Ce terrain unique fait de la Guyane une sentinelle particulière pour étudier le lien entre les agents infectieux et la grossesse.

Afin d’étudier l’étendue des conséquences des pathologies infectieuses chez les femmes enceintes en Guyane, ce travail propose d’étudier l’épidémiologie descriptive et analytique au travers des données d’études réalisées dans la maternité de l’ouest de la Guyane. Son objectif est également de réaliser une analyse du lien entre les différentes expositions infectieuses et le risque majoré des issues défavorables de la grossesse. Pour atteindre nos objectifs, nous avons conduit des études prospectives non interventionnelles, en suivant un modèle exposé-non exposé, ainsi que d’autres études rétrospectives descriptives impliquant des femmes enceintes exposées à des menaces infectieuses et résidant dans l’ouest guyanais.

Ce travail a permis d’identifier le jeune âge, la nulliparité et la précarité sociale comme des facteurs de risque majeurs de survenue des infections pendant la grossesse.

Nous avons pu confirmer le risque majoré de prématurité, de perte fœtale et de naissance par césarienne au sein de la population des mères ayant eu de la fièvre comparativement à celles ne l’ayant pas eu.  Nous avons confirmé l’effet tératogène du virus Zika et du virus Tonate.  En effet, nous avons décrit le premier cas de transmission verticale du virus Tonate associé à des malformations multiples chez un fœtus. De plus, nous avons démontré la relation entre l’infection fœtale au Virus Zika et un retard des acquisitions neurologiques et neurosensorielles du fœtus, du nouveau-né et des enfants jusqu’à l’âge de 3 ans. En 2020, la première vague de Covid 19 avant le développement de la vaccination a été particulièrement intense et a conduit dans notre population à un surrisque d’hémorragie du post-partum, de transfusion et d’admission en unité de soins intensifs dans la population des femmes infectées comparativement à celles non infectées. Elle a conduit également à un risque plus élevé de pertes fœtales. La précarité et les modifications du système de soins pendant l’épidémie auraient joué un rôle indirect. Ces constatations ont été finalement confirmées par plusieurs autres études à l’échelle internationale. Les épidémies sont parfois associées, ainsi en 2020, il coexistait l’épidémie COVID 19, une épidémie de dengue ainsi qu’une augmentation des cas de syphilis.

Nous avons rapporté une augmentation du nombre des cas de syphilis chez les femmes enceintes aboutissant à une véritable épidémie de syphilis dans l’ouest. Plus de la moitié des femmes enceintes infectées non traitées risque d’avoir une issue défavorable de leurs grossesses, incluant les naissances prématurées, les morts fœtales in utéro ou les morts périnatales ou encore des cas de syphilis congénitale pouvant entraîner des séquelles à distance.

Ainsi, les agents infectieux sont une cause importante de morbi-mortalité néonatale en Guyane et nécessitent une surveillance particulière.  Ils représentent au moins 4% des causes directes de mort fœtale sur le territoire.

Les issues des grossesses sont aggravées par d’autres facteurs de risque comme la précarité sociale, l’obésité, les pathologies cardiovasculaires, la malnutrition ainsi que l’exposition aux métaux lourds.  L’anémie, souvent d’origine multifactorielle, a été identifiée dans notre travail comme un facteur de risque indépendant de mort fœtale.

Les retombées de ces travaux sont majeures. Elles vont aider à optimiser le dépistage, le bilan initial, identifier les facteurs de risque aggravants, guider la prise en charge thérapeutique et la surveillance des infections chez les jeunes mères guyanaises pour réduire la morbi-mortalité maternelle et fœtale associée. Les inégalités sociales de santé en Guyane, les difficultés d’accès aux soins, l’isolement géographique de la population, et la faible offre de soins sur le territoire constituent des points à traiter en urgence pour pallier les effets négatifs de ces infections.

La situation géographique de la Guyane, sa biodiversité exceptionnelle, sa population multiculturelle et multiethnique, ses profondes inégalités de santé, ainsi que le vaste éventail de pathologies infectieuses et tropicales, en font un environnement de formation et de recherche singulier, notamment pour les pathologies infectieuses pendant la grossesse.  Ce petit territoire aux dépenses de santé substantielles est une sentinelle en Amérique latine qui peut ainsi éclairer des problématiques partagées par des milliards de personnes vivant au niveau de la ceinture intertropicale.

Mots clés : grossesse, amazone, maladie infectieuse émergente et réémergentes, arbovirose, Zika virus, Tonate virus, COVID 19, syphilis, maladies transmises par les moustiques, fièvre, malformation, mort fœtale in utéro, Inégalité sociale de Santé.

Abstract

Infectious agents are recognized as a cause of maternal and fetal morbidity and mortality. Recent global health emergencies, such as the Zika virus (ZIKV) and the severe acute respiratory syndrome coronavirus 2 (SARS-CoV-2), have highlighted human vulnerability to emerging infections. The numerous infectious epidemics that have occurred in French Guiana reveal the exposure of the population to numerous pathogens. Pregnant women and their fetuses are particularly vulnerable to infections due to physiological changes in the mother during pregnancy and the immature fetal immune system. The adverse outcomes associated with infections involves various mechanisms, including deterioration of the maternal hemodynamic status, teratogenic effects, or through placental and/or fetal infections.
French Guiana, an Amazonian territory that is also a part of the European Union, is experiencing rapid growth and boasts one of the highest birth rates in France. This French department is characterized by its complexity, with a diverse range of ethnic populations, some of whom live in challenging conditions. Due to the geographical context and persistent healthcare access inequalities, especially in the western part of the territory, pregnant women in French Guiana can be especially vulnerable to infectious threats.
On the other hand, studies confirm that infant mortality remains high, and premature births are among the highest in France. Many questions arise regarding the impact of various infectious epidemics and their role in this increased risk. Despite the challenging social context, pregnant women have access to the French healthcare system, diagnostic tools, and therapeutic resources at a European level and medical expertise for rapid diagnosis and management of infectious diseases, even in the absence of social coverage. This unique setting makes French Guina a sentinel for studying the relation between neglected infectious agents and pregnancy.

To study the extent and consequences of infectious diseases in pregnant women in western French Guiana, this work aimed to study the descriptive and analytical epidemiology through scientific data from the western French Guiana maternity. It will also analyze the link between different infectious exposures and the increased risk of maternal and neonatal adverse outcomes. To achieve our objectives, we conducted non-interventional prospective studies, following an exposed-unexposed model, as well as other retrospective descriptive studies involving pregnant women exposed to infectious threats and residing in Western French Guiana.
According to the results of our research, we found that young age, nulliparity, and social precarity are major risk factors for infections during pregnancy.
We confirmed the link between exposure to fever during pregnancy and the increased risk of prematurity, fetal loss, and delivery by cesarean section in the population of mothers who experienced a fever, compared to those who did not. We have confirmed the teratogenic potential of the Zika virus and the Tonate virus. In fact, we have described the first case of vertical transmission of the Tonate virus and its associated fetal birth defects. Furthermore, we have demonstrated the relationship between Zika virus infection and delayed neurological and neurosensory development in fetuses, newborns, and children up to the age of 3.
In 2020, the first wave of COVID-19, before the identification of the vaccine, was particularly intense and led to a higher risk of postpartum hemorrhage, transfusion, and admission to intensive care units in the population of infected women compared to those who were not infected. It also led to a higher risk of fetal adverse outcomes. Social precarity and changes in the healthcare system during the epidemic may have played an indirect role. These findings have been ultimately confirmed by several other international studies. Epidemics are sometimes associated, as in 2020, the COVID-19 epidemic, a dengue epidemic, and an increase in syphilis cases coexisted. We have reported an increase in the number of syphilis cases among pregnant women, resulting in a true syphilis epidemic in the west. More than half of non-treated pregnant women will have an unfavorable pregnancy outcome. Syphilis infection is associated with an increased risk of prematurity, intrauterine fetal death, perinatal death, and congenital syphilis with a risk of long-term sequelae.
Thus, infectious agents are a significant cause of fetal and neonatal morbidity and mortality in French Guiana and require special monitoring. It represents at least 4% of direct causes of fetal loss in the territory. Infections are exacerbated by other risk factors such as social precarity, obesity, cardiovascular diseases, malnutrition, and exposure to heavy metals. Anemia, often of multifactorial origin, appears to play a major role in unfavorable pregnancy outcomes in the region and has been identified as an independent risk factor for fetal loss. Social health inequalities, difficulties in accessing healthcare due to geographic isolation of the population, and limited healthcare services on the territory are urgent issues to address to mitigate the negative effects of these infections.
The outcomes of this work are significant. They will certainly help optimize screening, initial assessment, identify exacerbating risk factors, guide therapeutic management, and monitor infections in mothers to reduce maternal and fetal morbidity and mortality resulting from these infections. French Guiana, with its geographic location and equatorial climate, hosting exceptional biodiversity and a population of diverse ethnic backgrounds, along with a wide range of infectious and tropical diseases, provides a unique environment for training and research on various themes, including infectious diseases during pregnancy. This could make French Guiana a sentinel territory in Latin America, among many countries housing billions of people who share similar issues. This research would contribute to mitigating the global impact of these infections, which are still insufficiently studied, especially in a global context marked by healthcare access inequalities.

Keywords: pregnancy, Amazon, emerging and re-emerging infectious diseases, arboviruses, Zika virus, Tonate virus, COVID-19, syphilis, mosquito-borne diseases, fever, malformations, intrauterine fetal death, social health inequalities.

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